Revue historique vaudoise 131/2023
Les femmes, quelle histoire!
Cossy, Valérie, Devanthéry, Ariane,
ISBN:978-2-88901-251-0, 2023, 280 pages, 28 €
Ce nouveau numéro de la Revue historique vaudoise s’attache non seulement à décrire l’histoire des femmes, mais s’intéresse aussi à reconsidérer le rôle tenu par ces dernières au fil des siècles au niveau cantonal et local, en faisant se succéder parcours collectifs et cheminements personnels.
Description
Ce nouveau numéro de la Revue historique vaudoise s’attache non seulement à décrire l’histoire des femmes, mais s’intéresse aussi à reconsidérer le rôle tenu par ces dernières au fil des siècles au niveau cantonal et local, en faisant se succéder parcours collectifs et cheminements personnels.
En attendant la réalisation d’une ample recherche sur l’histoire des femmes dans le canton de Vaud, ce numéro de la RHV pose des balises encore largement inédites: de la cité romaine d’Avenches au Moyen Âge, du XVIIIe siècle à aujourd’hui, les thématiques abordées sont larges et originales (vie professionnelle, intimité, justice, religion, militantisme, arts, historiographie, espace public, etc.) et attestent que, en histoire comme ailleurs, c’est bien les questions que l’on se pose qui dessinent les réponses qu’on y apporte et qu’il est fondamental de renouveler nos manières d’interroger l’Histoire.
Les articles sont ainsi nombreux à faire émerger des destins féminins ayant transcendé les rôles traditionnels que leur attribuait la société et leur époque pour devenir intellectuelles, écrivaines, politiciennes, cinéastes ou photographes. Ainsi sont évoqués dans ce volume des parcours contrastés qui vont d’Isabelle de Montolieu à Herminie Chavannes et Germaine Martin ou de Jacqueline Veuve à Yvette Jaggi.
Ouvrage collectif sous la direction de Valérie Cossy avec la collaboration d’Ariane Devanthéry.
Coordination: David Auberson.
Table des matières
David Auberson
Éditorial
Valérie Cossy
Introduction. L’histoire vaudoise avec elles
Anne Bielman et Michel Fuchs
Pompeia Gemella, Iulia Festilia et les autres: des femmes dans l’Avenches romaine
Éclairage:
Léonard Burnand
La féminisation progressive de la Faculté des lettres de Lausanne
Marie Bron
«Au four et au moulin»: les métiers féminins à Lausanne au bas Moyen Âge
Élisabeth Salvi
Femmes incendiaires: crimes et châtiments au XVIIIe siècle
Éclairage:
Joëlle Moret
Place(s) aux femmes: féminisation des noms de rue à Lausanne
Sylvie Moret Petrini
Pratiques féminines de l’écriture personnelle au XVIIIe siècle en Pays de Vaud
Marion Curchod
Une renommée littéraire européenne: la carrière exceptionnelle d’Isabelle de Montolieu
Éclairage:
Sylviane Klein
Simone Chapuis: féministe un jour, féministe toujours !
Béatrice Lovis et Nathalie Dahn-Singh
L’écriture de l’histoire au féminin: deux figures pionnières, Élisabeth Polier (1740-1817) et Herminie Chavannes (1798-1853)
Aline Johner
Contrôle des naissances et «culture sexuelles» chez les Payernoises durant le premier XIXe siècle
Éclairage :
Adèle Morerod
Regarder autrement: le cinéma de Jacqueline Veuve
Philippe Kaenel:
De la Société des femmes artistes à la Fondation Ateliers d’Artiste: Nanette Genoud
Éclairage:
Sylviane Klein
Madeleine Moret: mécène discrète et scientifique reconnue
Marc Vaucher
Tenter l’espace public à la Belle Époque:
l’Union des Femmes de Lausanne (1896-1920)
Éclairage :
Sylviane Klein
Yvette Jaggi: Incontournable figure lausannoise des années 1990
Pauline Milani et Raphaëlle Ruppen Coutaz
Sortir de l’invisibilité. Le Dictionnaire sur l’Histoire des femmes en Suisse
Diana Le Dinh
De l’arrière-boutique à la devanture: les femmes et le métier de photographe à Lausanne
Éclairage:
Adèle Morerod:
Carole Roussopoulos: la vidéo pour écrire l’histoire
Comptes rendus
Nécrologie:
Gilbert Coutaz
Guy Le Comte (1942-2023), «Nous sommes le passé de nos descendants»
Presse
Quand les femmes vaudoises font histoire
La Revue historique vaudoise consacre son dernier numéro aux femmes, à leur rôle et leur implication au niveau local et cantonal. Un pari complexe, un résultat stimulant.
Être femme et Vaudoise! Voilà qui pourrait tenir de la double peine! La réalité, heureusement, s’avère plus complexe si l’on en croit la Revue historique vaudoise. Décrire l’histoire de ces femmes et reconsidérer leur rôle «au fil des siècles au niveau cantonal et local», tel est le propos de ce 131e numéro qui, en une vingtaine de contributions, conduit du 1er siècle avant J.-C. à nos jours. Le parcours débute à Avenches, à l’époque romaine. Anne Bielman Sanchez et Michel E. Fuchs s’intéressent au destin singulier de Iulia Festilla qui fonctionna comme exécutrice testamentaire pour deux proches et comme première prêtresse du culte impérial – l’autel élevé par ses soins a été retrouvé comme base de la chaire de l’église de Baulmes. Au bas Moyen Âge, avec Marie Bron, on découvre ensuite l’omniprésence des femmes dans les métiers du pain, soit «au four et au moulin». L’auteure de l’article relève toutefois que si le domaine de la boulangerie semble spécifiquement féminin, celui de la pâtisserie est en revanche masculin. Au XVIIIe siècle, le féminin et le feu à nouveau se conjuguent, mais dans une constellation moins idyllique. C’est aux « crimes et châtiments» des femmes incendiaires que s’intéresse Élisabeth Salvi en partant des archives judiciaires. Certaines de ces femmes brûlent, ou menacent de brûler, la maison du voisin à la suite d’un différend. D’autres mettent le feu à leur propre demeure pour se venger ou par démence. «Litige asymétrique, menace dissimulée, l’attaque incendiaire évite la confrontation immédiate entre la femme et l’homme, conclut l’auteure. En revanche, elle rétablit une égalité dans le rapport de forces entre les sexes, entre le maître et la servante, alors que l’inégalité est entérinée par les usages et défendue par les lois.» La suite? Qu’il s’agisse de la Société des femmes artistes, de la féminisation des noms de rues à Lausanne ou de la trajectoire de la cinéaste Jacqueline Veuve, on la connaît en principe un peu mieux. Un court texte s’intéresse également au par-cours original de la politicienne Yvette Jaggi. On suit enfin les différentes péripéties de l’Union des femmes de Lausanne (1896-1920), l’une des plus importantes associations féministes suisses de la Belle Époque. L’occasion de découvrir l’étonnant arbre généalogique imaginé, dans les années 1910, par l’association pour synthétiser son histoire sous la forme d’une success story. De quoi rebooster les vocations et encourager les dons car, oui, bien évidemment, tout ne fut pas rose.
Mireille Descombes, Allez savoir !, n°86, mai 2024, UNIL.
Les femmes surgissent de l’histoire vaudoise
À l’époque romaine, le territoire cantonal actuel était-il habité à 80% par des hommes? C’est ce que pourraient croire les historiens en compulsant les écrits disponibles sur les occupants de cette région. Longtemps invisibilisées dans les récits historiques, les femmes sont remises en lumière dans l’ouvrage «Les femmes: quelle histoire!» De l’Antiquité à l’époque contemporaine, la «Revue historique vaudoise» s’est attelée à dénicher des parcours féminins et des Vaudoises qui ont défriché des secteurs emblématiques de l’émancipation.
[…]
Les auteurs de l’ouvrage ont dû se livrer à un travail quasi archéologique pour trouver des femmes derrière des vestiges antiques devenus anonymes, derrière les patronymes de pères et de maris ou derrière l’usage systématique du masculin par un archiviste. Pour rester dans les mémoires, certaines femmes se sont organisées en associations en tenant procès-verbal ou, à l’image de l’Union des femmes de Lausanne en 1913, ont créé leur propre visuel.
Au Moyen Âge, il y a bel et bien eu des boulangères vaudoises, confirme une médiéviste. La présence de femmes incendiaires, moins visibles, est aussi attestée au XVIIIe siècle: de 1702 à 1796, 17 affaires d’incendies ont été découvertes, impliquant 9 hommes et 8 femmes. Pour s’être vengées d’un employeur ou pour avoir été violées, elles furent marquées au fer, bannies, décapitées, étranglées ou brûlées. «Inclure les femmes dans l’histoire correspond à un geste forcément subversif, car l’ensemble du récit historique s’en trouve modifié», relève Valérie Cossy.
[…]
Article complet de Claude Béda dans 24 heures, 8 mars 2024
Où sont les femmes ?
Longtemps invisibilisées dans les récits et manuels d’histoire, les femmes sont remises en lumière. Les historiennes et les historiens s’attachent désormais à retrouver leurs traces et à analyser leurs parcours et leurs combats pour conquérir leurs droits. Le dernier numéro thématique de la Revue historique vaudoise publié aux Éditions Antipodes et sobrement intitulé «Les femmes: quelle histoire!» s’inscrit dans le sillage ouvert notamment par l’historienne française Michelle Perrot qui œuvra tout au long de sa carrière à légitimer ce nouveau champ de recherche. Les contributions de ce numéro dévoilent des parcours de femmes individuels ou collectifs que l’histoire a longtemps occultés.
A qui se donne la peine de les chercher, les femmes apparaissent pourtant aussi dans les archives privées ou publiques. Léonard Burnand nous rappelle la récente arrivée des femmes sur les bancs de l’Université de Lausanne en tant qu’étudiantes ou détentrices de chaires. En 2021, les étudiantes étaient majoritaires (64%) à la Faculté des Lettres de l’Unil, ainsi que les doctorantes (58%). L’accession des femmes au rang professoral ne s’est accélérée que dans le dernier tiers du XXe siècle. Ainsi en 1977, aucune professeure n’enseignait à la Faculté des Lettres. Les premières nominations de femmes eurent lieu dans les années 1980. Le retard fut comblé en quarante ans. De 1981 à 2021, les professeures nommées à la Faculté des Lettres passèrent de 0 à 48%.
Les femmes furent aussi longtemps absentes dans nos espaces publics qui commémoraient surtout des hommes. Ce déséquilibre ne reste plus désormais dans une impasse. Les noms de rues se féminisent progressivement sous l’impulsion de militant-e-s et de municipalités. Lausanne a ainsi réagi face à cet effacement des femmes: sur 700 rues, places et avenues, 110 célèbrent des personnalités. Parmi les heureux élus, on ne comptait encore dernièrement que trois femmes dont le nom avait été donné à une rue! La Municipalité de Lausanne a entrepris de rééquilibrer la situation et d’œuvrer à la création d’un espace public plus égalitaire: en 2026, les nouveaux noms de rue féminins devraient atteindre 27% du total, comme l’annonce dans sa contribution Joëlle Moret, déléguée à l’égalité à Lausanne.
[…]
Ce numéro thématique, dont la richesse nous empêche de recenser toutes les contributions, consacre encore des articles aux femmes qui ont œuvré dans les champs de la littérature, des arts, de la photographie et du cinéma.
Nicolas Quinche, La Côte, édition du 29 décembre 2023
L’histoire vaudoise au prisme des femmes pendant 2000 ans: un autre regard
À l’image de la somme en cinq volumes de Georges Duby et Michelle Perrot, ce numéro thématique annuel de la Revue historique vaudoise offre un aperçu diachronique de l’histoire des femmes dans le canton de Vaud, de l’Antiquité à nos jours.
La recherche historique constitue un fondement indispensable de tout discours sur le genre, dont il est essentiel de saisir le caractère culturellement contingent au fil des siècles.
Dirigé par Valérie Cossy (Section d’anglais), ce numéro retrace à travers douze articles et sept éclairages, dus à des collaboratrices et des collaborateurs venus de plusieurs champs historiques de la Faculté des lettres, la présence des femmes, longtemps occultée par l’histoire légitime.
S’appuyant sur toutes sortes de traces, de documents manuscrits et imprimés, officiels ou privés, révélant des œuvres de peinture et de photographie, des films vidéo et cinéma, les travaux témoignent de la participation continue des femmes à l’Histoire, de la difficile identification des sources, et d’une volonté de les faire parler.
Labelettres, 14 décembre 2023