Willi Gautschi et la Grève générale de 1918

Un historien et son oeuvre en contexte

Yersin, Séveric,

ISBN:978-2-88901-198-8, 2023, 232 pages, 23€

Début du XXIe siècle, face au retour des grèves et des manifestations en Suisse et alors que la droite radicale continue de condamner tout mouvement social, se pencher sur l’interprétation de la Grève générale de 1918 est un moyen de réfléchir à l’impact des mouvements sociaux, passés et présents, sur la société suisse.

Format Imprimé - 29,00 CHF

Description

La Grève générale de 1918 est la plus grande crise de politique intérieure de la Suisse moderne: 250’000 grévistes font face à 100’000 soldats en pleine Grippe espagnole. L’interprétation de cet épisode est contestée : s’agissait-il d’une tentative de révolution bolchévique ou d’une mobilisation populaire légitime ? Willi Gautschi est le premier historien à consulter les archives et à proposer une version consensuelle, mais son travail est aujourd’hui à nouveau remis en question.

Est-il est légitime d’organiser des grèves et des manifestations en Suisse, ou faut-il privilégier les élections, le référendum et l’initiative populaire ? L’interprétation de la Grève générale, qui met 250’000 grévistes dans les rues face à 100’000 soldats, est au coeur de cette question. Longtemps, le récit dominant en faisait une révolution bolchévique manquée. Mais à partir des années 1960, les historien·ne·s ont insisté sur la détérioration des conditions de vie des classes ouvrières, sur l’autoritarisme du gouvernement et sur la volonté d’affrontement de l’armée. Le travail de Willi Gautschi, le premier à mobiliser des archives, occupe une place importante dans cette réflexion : aujourd’hui encore, ses livres servent de référence. Pourtant, ils ne sont pas sans biais interprétatifs majeurs, révélateurs des débats socio-politiques de la „société du consensus“ des Trente Glorieuses comme de l’ouverture post-1968.

En se penchant sur les archives personnelles de Willi Gautschi, ce livre étudie la façon dont l’histoire est écrite, et comment elle s’insère dans les débats contemporains. Car interpréter la Grève générale de 1918, c’est se prononcer aussi sur les grèves et manifestations de son temps – aujourd’hui, sur les grèves féministes, pour le climat ou pour de meilleures conditions salariales.

Séveric Yersin est historien suisse. Il est spécialisé dans l’histoire suisse des XIXe et XXe siècles, en particulier en histoire politique et sociale. Ses recherches actuelles concernent l’émergence et le développement des institutions fédérales de contrôle des épidémies.

Préface de Malik Mazbouri (Universités de Lausanne et de Berne).

Presse

Chronique du livre dans la Revue Historique Vaudoise

La grève générale est un des sujets les plus étudiés dans l’histoire contemporaine de la Suisse ; en cela, cette parenthèse de trois jours de la mi-novembre 1918, dont la mise en échec rapide contraste avec l’intensité des troubles politiques dans les pays limitrophes, soulève essentiellement des enjeux mémoriels et historiographiques, ce que les nombreuses publications qui ont accompagné les commémorations de son centenaire ont confirmé. En comparaison des précédentes parutions, l’ouvrage récent de Séveric Yersin a le mérite de proposer une approche originale. Dans le cadre d’un travail de mémoire réalisé en 2017 à la section d’histoire de l’Université de Lausanne, ce jeune historien a en effet décidé d’examiner le contexte et le processus d’élaboration des travaux historiques de Willi Gautschi, qui ont été réalisés dans les années 1950 à 1970, mais qui sont aujourd’hui encore considérés comme les références sur la question par les spécialistes de la grève générale. Pour ce faire, il s’appuie notamment sur les archives personnelles de l’historien argovien.

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Christophe Farquet, Revue Historique Vaudoise, 132/2024, pp. 229-231.


Chronique du livre de Séveric Yersin, en allemand, dans Argovia.

Séveric Yersin (geb. 1991) legt eine in zweierlei Hinsicht bemerkenswerte Monografie vor. Zum einen finden Masterarbeiten selten ein Publikum ausserhalb der Hochschule. Um eine solche in aufbereiteter Form handelt es sich beim vorliegenden Buch nämlich. Yersin reichte sie ursprünglich 2017 bei François Valloton und Malik Mazbouri an der Universität Lausanne ein und präsentiere seine Resultate 2018 an der Mai-Tagung der Historischen Gesellschaft Aargau. Zum anderen befasst sich Yersin mit dem Aargauer Historiker Willi Gautschi (1920-2004) und dessen vier zentralen Arbeiten über den Generalstreik von 1918, die in der welschen Schweiz auch aufgrund fehlender Übersetzungen nie rezipiert wurden. In der Suisse romande ist hochstens Gaucschis biografische Studie über General Guisan aus dem Jahr 1989 bekannt.

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Une chronique de Patrick Zehnder, Argovia 2024.


Séveric Yersin, Willi Gautschi et la grève générale de 1918. Un historien et son œuvre en contexte.

Issu d’un mémoire de master dirigé par Malik Mazbouri et François Vallotton, l’ouvrage de Séveric Yersin est à la fois une biographie de l’historien suisse Willi Gautschi (1920-2004) et, comme l’indique le sous-titre, une mise en contexte de son œuvre et en particulier de Der Landestreik 1918, ouvrage paru à l’occasion du cinquantenaire de la Grève générale, qui reste une référence sur cet événement majeur de l’histoire du mouvement ouvrier suisse. En retraçant les modalités de production et de réception des travaux de Gautschi, Yersin montre comment se met en place un consensus interprétatif autour de l’événement. Il apporte aussi un éclairage bienvenu sur l’historiographie suisse de la seconde moitié du xxe siècle.

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En 2013, l’historien Marc Vuilleumier (1942-2020) avait livré, dans le volume Histoire et combats, un riche essai d’ego-histoire qui permettait d’approcher les conditions de production de l’histoire du mouvement ouvrier dans la Suisse anticommuniste de la guerre froide. L’ouvrage de Yersin complète remarquablement le tableau brossé par Vuilleumier. Il permet également aux lecteurs et aux lectrices francophones d’approcher l’œuvre de Gautschi qui, malgré son importance pour l’histoire du pays, n’est pas traduite dans la deuxième langue nationale.

Note de lecture de Frédéric Deshusses, Le carnet du mouvement social, N°286, janvier-mars 2024.